Introduction
L’intelligence artificielle transforme progressivement le paysage des systèmes d’information géographique (SIG). Dans QGIS, un nombre croissant de plugins exploitent les modèles de langage (LLM) pour assister les utilisateurs dans leurs tâches quotidiennes : génération de scripts PyQGIS, analyse des données spatiales, suggestions de traitements, ou même accompagnement pédagogique pour les débutants.
Ces assistants IA pour QGIS ne remplacent pas l’expertise humaine, mais ils permettent de gagner du temps, de standardiser certaines opérations, et de faciliter l’apprentissage de la programmation ou des flux de travail SIG. De plus, ils ouvrent la voie à de nouvelles interactions avec le logiciel, où l’utilisateur peut “dialoguer” avec QGIS en langage naturel pour obtenir des résultats ou des recommandations.
D’un point de vue technique, ces assistants reposent généralement sur des modèles LLM hébergés localement ou sur des serveurs distants, capables de comprendre et de générer du code PyQGIS. Certains nécessitent un environnement Python spécifique, un plugin serveur ou un conteneur dédié, tandis que d’autres peuvent fonctionner directement dans QGIS via des extensions légères. La qualité des suggestions dépend du modèle utilisé, de sa taille, de son entraînement et de la configuration du système (CPU/GPU disponible, versions des librairies, etc.).
Cet article propose un panorama pratique des principaux plugins IA disponibles dans QGIS, en détaillant leurs fonctionnalités, leurs forces et leurs limites, pour aider les utilisateurs à choisir l’assistant le mieux adapté à leurs besoins et à intégrer l’IA dans leurs projets SIG de manière éclairée.
Panorama des assistants IA pour QGIS
Après avoir présenté le contexte et les enjeux des assistants IA dans QGIS, il est utile de passer en revue les principaux plugins disponibles, leurs fonctionnalités, et leurs limites. Chacun de ces outils vise à faciliter l’interaction avec QGIS, mais avec des approches différentes : certains sont centrés sur la génération automatique de scripts PyQGIS, d’autres sur l’assistance dans les traitements géospatiaux ou la documentation technique.
Voici un aperçu des principaux plugins :
- Intelligeo
Intelligeo se concentre sur l’automatisation des tâches SIG et la génération de scripts PyQGIS à partir de prompts en langage naturel. Il est particulièrement adapté aux utilisateurs souhaitant accélérer des workflows répétitifs ou obtenir des exemples de code. - Q-LLM
Q-LLM intègre un modèle LLM directement dans QGIS pour assister les utilisateurs dans l’écriture de scripts et la compréhension des données. Son atout majeur est la possibilité d’obtenir des suggestions contextuelles basées sur les couches et attributs du projet actif. - Kue AI
Kue AI propose une interface conversationnelle permettant de poser des questions sur les données spatiales et d’obtenir des réponses sous forme de texte ou de scripts. Il met l’accent sur l’accessibilité pour les utilisateurs moins expérimentés en programmation. - Promptly
Promptly fonctionne comme un assistant génératif polyvalent : il peut rédiger des scripts, fournir des exemples de traitements, ou expliquer des fonctions QGIS. Il se distingue par la variété des modèles supportés et son orientation “exploratoire” pour tester différentes approches dans QGIS.
Comparatif synthétique
| Nom du plugin | ID / Repo | Version actuelle | Modèle IA utilisé | Licence | Compatibilité QGIS | Fonctionnalités principales | Lien / Source |
|---|---|---|---|---|---|---|---|
| IntelliGeo | 3495 (staging.plugins.qgis.org) | 0.1.1 (staging.plugins.qgis.org) | Divers LLMs (intelligeo.org) | Apache 2.0 (intelligeo.org) | QGIS >= 3.0 (staging.plugins.qgis.org) | Génération de scripts/workflows via prompts | https://intelligeo.org/ |
| Q-LLM | 3920 (plugins.qgis.org) | 1.0 (expérimental) (plugins.qgis.org) | Gemma 3 (plugins.qgis.org) | Non précisé | QGIS (version non spécifiée) | Assistant cartographique par prompts | https://github.com/osgeokr/q_llm |
| Kue AI | — (commercial) (buntinglabs.com) | abonnement mensuel | LLM propriétaire / cloud | Commercial | QGIS (Plugin) | Chatbot intégré QGIS, geoprocessing autonome | https://buntinglabs.com/solutions/kue-ai |
| Promptly | 3788 (plugins.qgis.org) | 2.0 | Plusieurs modèles (Ollama, OpenAI…) | Non précisé | QGIS >=3.0 (plugins.qgis.org) | Exécuter et corriger code PyQGIS généré via prompt | https://github.com/hamarshehmhmd/promptly |
Intelligeo
Retours et commentaires utilisateurs
Points positifs mentionnés :
- Le blog officiel de QGIS mentionne IntelliGeo comme un plugin « IA-related » prometteur, ainsi que son interface de chat et sa capacité à générer du code ou un modèle graphique directement dans QGIS. (QGIS.org blog)
- Le site du plugin explique bien qu’il utilise des LLM (large language models) pour automatiser des workflows géospatiaux et invite à la contribution. (intelligeo.org)
- Le changelog indique des progrès concrets : par exemple la version 0.1.0 ajoute une “Memory Support” (mémoire courte pour l’agent LLM) et meilleur gestion des dépendances. (plugins.qgis.org)
Limites et critiques relevées :
- L’installation nécessite une clé API pour les LLM externes (ex. OpenAI, Cohere) ce qui est un frein pour certains utilisateurs. (intelligeo.org)
- Le site indique explicitement que “hallucinated imports” (imports erronés) restent un problème : certains scripts générés font référence à des modules inexistants dans l’environnement QGIS/Python de l’utilisateur. (intelligeo.org)
- Le plugin est toujours classé “expérimental” (version 0.x) dans le dépôt des plugins. Cela signifie que sa maturité est encore limitée. (plugins.qgis.org)
Témoignages / retours utilisateurs
- Le guide officiel indique que « A common issue when using the plugin is “hallucinated imports,” where scripts reference non-existent imports or modules in your QGIS or Python environment. » (intelligeo.org) Cela signifie que même un assistant IA “préparé” peut générer du code contenant des références à des modules qui n’existent pas sur l’ordinateur de l’utilisateur .
- Selon le changelog de la version 0.0.2, une nouveauté est le « Reflection Mechanism: IntelliGeo now attempts to debug problematic PyQGIS scripts and provide improved output when such scripts are generated. » (plugins.qgis.org) Ce retour montre que les développeurs ont conscience des limitations (et qu’ils y travaillent), ce qui est utile à mentionner pour montrer l’état de développement.
- Dans une page tutoriel externe, on lit : « WARNING – IntelliGeo does not search the web, and is not capable of finding datasets online. It is designed to read the documentation of QGIS and generate Python code for specific tasks. » (camptocamp.github.io) Ce retour d’expérience précise une limite d’usage : l’assistant ne “comprend” pas forcément le contexte complet de données ou de couche — ce que l’on peut inclure dans le chapitre “Limites actuelles”.
Ce qu’il faut en retenir
- IntelliGeo est bien perçu comme une initiative intéressante, innovante et alignée sur les tendances “IA + géospatial”.
- Mais les usages réels montrent que :
- il faut pouvoir configurer un LLM externe ou une clé API,
- certains scripts générés nécessitent intervention manuelle,
- et son statut “prototype/expérimental” incite à la prudence.
- Il faut souligner que ce type de plugin est encore en phase d’expérimentation.
Q-LLM
Points positifs
- Le plugin est listé sur le dépôt officiel des plugins QGIS (ID 3920) et indique qu’il est « lightweight QGIS assistant powered by Gemma 3 ». (plugins.qgis.org)
- Selon un article d’introduction (en coréen) le plugin propose « Gemma 3 LLM et interaction directe dans QGIS » + « automatisation de déplacement de carte via des prompts en langage naturel ». (foss4g.tistory.com)
- Version 1.0 « Experimental » est déjà publiée. (plugins.qgis.org)
- Le concept est porteuse : utiliser un modèle de langage directement depuis QGIS pour manipuler la carte via prompts est innovant et correspond à un besoin croissant d’interfaces plus naturelles en SIG.
Limites et précautions constatées
- Le plugin est marqué comme expérimental. Cela indique qu’il n’est pas encore considéré comme totalement stable ou complet. (plugins.qgis.org)
- La description semble assez légère sur les retours d’usage, avec peu de commentaires ou issues publiques (peu de “critiques approfondies” disponibles).
- Le champ “External dependencies (PIP install string)” semble vide ou minimal : il peut y avoir des dépendances non documentées ou des difficultés d’installation selon plateforme. (plugins.qgis.org)
- Comme pour tout plugin exploitable via un modèle de langage, il y a des risques : prompts mal formulés, résultats inattendus, dépendance au contexte des données, à la version de QGIS ou de Python, etc.
- Le fait que le modèle se concentre sur des fonctions “map movement via prompt” peut limiter l’usage si on attend des analyses plus complexes, scripts PyQGIS générés, etc.
Pistes d’amélioration & suggestions
- Une section “issues” ou “feedback utilisateur” plus active : inciter les utilisateurs à signaler bugs, suggestions, et remontées d’usage pour améliorer l’outil.
- Documentation d’installation et des dépendances claires pour chaque plateforme (Windows, Linux, Mac) afin de réduire les obstacles.
- Exemples d’usage concrets et variés (pas seulement “déplacer la carte”), mais aussi “ajouter une couche selon prompt”, “créer un script PyQGIS”, “automatiser une tâche géospatiale assez complexe”.
- Modularité : permettre l’usage d’autres modèles ou serveurs LLM (pas seulement Gemma 3) pour flexibilité selon ressources machine.
- Protection/validation des résultats : prévoir un retour visuel/rapport sur ce que l’IA a fait (“Le plugin a déplacé la carte à tel endroit selon le prompt ‘…’”, mais vérifiez) pour garantir que l’action automatisee est correcte.
Témoignages / retours utilisateurs
- Le plugin apparaît sur le dépôt officiel des extensions QGIS (ID 3920) comme “Experimental” version 1.0.
- Le dépôt GitHub mentionné dans certains articles semble peu ou pas actif : peu d’issues ouvertes ou référencées pour ce plugin précis.
- Aucun retour clair trouvé dans les forums / Reddit indiquant des bugs ou des fonctionnalités manquantes spécifiquement pour Q-LLM.
Le fait qu’il n’y ait peu de retours visibles peut indiquer soit :
- Que le plugin est peu utilisé – ce qui est un point à inclure dans les limites (“usage limité/communauté faible”).
- Soit que les utilisateurs ne remontent pas leurs retours publiquement – ce qui peut limiter la visibilité de ses problèmes.
- On peut donc qualifier ce plugin de « prototype encore peu éprouvé », ce qui est cohérent avec sa mention “Experimental”.
- Alors que certaines initiatives similaires disposent de listes d’issues ou de feedback utilisateurs documentés, ce plugin n’en présente pour l’heure que peu — ce qui invite à la prudence.
Conclusion
Le plugin Q-LLM est prometteur : il s’adresse à l’évolution des usages SIG vers davantage d’interactions naturelles. Toutefois il ne semble pas encore mature, ce qui signifie :
- l’installer pour tester, pas pour usage critique en production.
- s’attendre à devoir faire des ajustements, signaler des bugs, participer à l’amélioration.
Kue AI Assistant
Points positifs
- Sur la page officielle, Kue est présenté comme un assistant « built directly into QGIS » qui permet d’exécuter des commandes que l’on ferait manuellement, et de faire gagner du temps à l’utilisateur novice comme confirmé. (buntinglabs.com)
- Il permet des actions variées dans QGIS : stylisation de couches, filtrage sans SQL, choix automatique d’algorithmes de géotraitement, ajout de données OSM via un prompt. (buntinglabs.com)
- Il est listé sur le dépôt officiel des plugins QGIS (ID 3535) avec de bonnes statistiques de téléchargement (≈ 9 743 téléchargements et 28 votes au moment de relevé) ce qui indique un intérêt réel. (plugins.qgis.org)
- Le modèle commercial est clair : essai gratuit 30 jours, puis abonnement (~ US$19/mois). (buntinglabs.com)
Critiques & limites relevées
- Le modèle est commercial et basé sur abonnement, ce qui peut être un frein pour des utilisateurs individuels ou budgets restreints. (buntinglabs.com)
- Bien que Kue soit présenté comme très capable, certaines sources académiques notent que sa fonctionnalité reste limitée comparée à des attentes d’analyse pur langage naturel–SIG (ex : ne génère pas forcément des requêtes OverpassQL ou des workflows complexes). (eprints.ost.ch)
- Il manque de retours utilisateurs très détaillés/documentés dans les forums publics : peu de discussion sur bugs spécifiques ou retour d’expérience utilisateur approfondi.
- Le coût + modèle d’abonnement + dépendance à un service externe peuvent poser des questions de souveraineté / confidentialité des données selon contexte géospatial.
- Comme pour beaucoup d’assistants IA, la qualité des résultats dépendra fortement de la formulation des prompts (le site le souligne : « define your command as precisely as you can… »). (buntinglabs.com)
Témoignages positifs
- Le site officiel indique : « Kue can help you quickly execute commands you would otherwise do manually, so new users can unlock QGIS’ full potential and experienced users can do their work far faster. » (buntinglabs.com)
- Un blog de veille géospatial mentionne : « Kue, développé par Bunting Labs, est un assistant intelligent qui simplifie les tâches dans QGIS en automatisant des actions telles que le filtrage des données, la symbologie et l’exécution de traitements géospatiaux. » (emmanuelbama.net)
- Dans un fil Reddit, on voit que le plugin a ≈ 11 000+ téléchargements et 29 votes ce qui témoigne d’un intérêt réel de la communauté. (plugins.qgis.org)
Retours plus critiques ou à nuancer
- Une étude académique note : « Kue… focalise sur l’assistance pour la symbologie, la recherche de jeux de données, et l’ajout de basemaps. … Mais sa fonctionnalité ne s’étend pas à générer des requêtes OverpassQL depuis le langage naturel. » (eprints.ost.ch)
- Le modèle commercial et d’abonnement impose un coût (~ 20 $/mois) ce qui peut freiner certains utilisateurs ou rendre l’usage moins accessible. (buntinglabs.com)
- Bien que très prometteur, peu de retours détaillés « bugs / cas d’usage réels » sont disponibles publiquement, ce qui limite la visibilité de ses forces et faiblesses exactes.
À retenir
- Kue est un des plus aboutis commercialement des assistants IA pour QGIS, avec une interface et des promesses solides.
- Mais son caractère commercial + dépendance + limite de documentation publique rendent important d’en mentionner les précautions : coût, usage, données, attentes.
Alors que Kue est salué pour sa capacité à automatiser des tâches SIG via prompt, certains retours d’usage signalent que ses capacités restent focalisées (symbologie, filtrage) et que l’accès via abonnement peut en limiter l’usage dans les contextes à budget restreint.
Promptly
Points positifs
- Le plugin est bien référencé dans le dépôt officiel des extensions QGIS sous la version 2.0, annoncée comme « Major redesign with modern UI… support for multiple LLM providers, database schema integration, layer metadata reference, code execution with error handling and fixing ». (plugins.qgis.org)
- Il revendique la prise en charge de plusieurs fournisseurs LLM (ex : Ollama, OpenAI, OpenRouter, Anthropic, endpoints personnalisés) ce qui lui donne une flexibilité intéressante. (QGIS.org blog)
- Le nombre de téléchargements / votes commence à être visible : dans la liste des plugins, on le voit avec environ 1 374 téléchargements et 14 votes pour la version 2.0. (plugins.qgis.org)
Critiques & limites relevées
- Un témoignage d’usage / tutoriel indique : « Promptly ne trouve pas la couche, il faut donner le nom exact de la couche dans le projet QGIS. Par contre, il propose une liste de couche à choisir. … Promptly zoome sur Null Island, il n’est pas capable de comprendre la projection de la couche. » (camptocamp.github.io)
Ce retour souligne un manque de “contexte projet” pris en compte par le plugin ou une faible robustesse dans la détection automatique des couches/projections. - Même s’il supporte plusieurs LLM, il reste relativement récent (version 2.0 sortie mars 2025) ce qui peut signifier un niveau de maturité encore limité. (plugins.qgis.org)
- Il n’y a pas (ou peu) de large retour documenté public sur “bugs fréquents” ou “cas d’usage concluants” : ce qui renforce l’idée qu’il est encore à tester par la communauté.
Extrait du dépôt
- Répertoire GitHub : “hamarshehmhmd/Promptly” — décrit comme « A QGIS plugin that provides a simple interface to send prompts to various LLM providers and execute the generated Python code in QGIS. » (GitHub)
- La page officielle du plugin note : « This plugin provides an interface to send prompts to various LLM providers (Ollama, OpenAI, OpenRouter, Anthropic, and custom endpoints) and execute the generated Python code in QGIS. » (plugins.qgis.org)
- Le changelog de la version 2.0 indique : “Major redesign with modern UI, tabbed interface for better organization, improved resizing capabilities, progress bar for visual feedback…” (plugins.qgis.org)
- À noter : le dépôt GitHub signale 0 issues ouvertes à ce jour. (GitHub)
Points importants
Le fait qu’il y ait peu ou pas de issues publiques (0 issues ouvertes) peut indiquer :
- Soit un bon niveau de stabilité jusqu’à présent,
- Soit que les utilisateurs ne remontent pas leurs retours publiquement — ce qui reste une limite à signaler.
- Le plugin supporte de nombreux fournisseurs LLM, ce qui est un vrai atout pour la flexibilité (Ollama, OpenAI, OpenRouter, Anthropic…).
- Cependant, étant donné que la communauté de retours est encore relativement légère, on peut le qualifier comme « prometteur mais à tester/éprouver ».
- Le fait que la version 2.0 ne soit pas “Experimental” (selon la fiche plugin) peut être un signe de maturité relative. (plugins.qgis.org)
Résumé
Promptly apparaît comme un des plus complets concernant le support multiformat de LLM pour QGIS — ce qui le distingue. Cependant, comme souvent avec les plugins IA pour QGIS, il faut garder à l’esprit :
- Il peut y avoir des erreurs de contexte (choix de couche, projection) malgré l’automatisation, donc vigilance.
- Version récente => usagers encore limité, feedback publique encore peu nombreux.
- C’est un exemple intermédiaire : plus avancé que l’expérimental, mais peut‑être pas encore “production ready”.